L’eau
De cette rivière
Fofolle mais pas farouche
L’eau
Si fraîche et claire
Vous met l’eau à
La bouche
(Claude Nougaro – Eau douce – extrait de l’album La Note Bleue – 2004)
Que répondre à la question de l’ami Mathieu posée le 5 avril par mail ?
Hello Michel,
Mathieu
Le texte était accompagné en pièces jointes, du white paper de l’ICO de O’Claire et du portrait d’une page du président de Sunwaterlife publié par La Gazette du Midi. Comme vous pouvez commencer à le constater chèr(e) ami(e) lectrice ou lecteur fidèle, j’ai décidé de partager une nouvelle fois avec vous, mon analyse.
Sunwaterlife est une société simplifiée par actions au capital de 62 100 euros créée le 22 octobre 2014 à Toulouse par Christophe Camperi-Ginestet, son président et par Hervé Le Berre son directeur général. Le site web societe.com nous indique que son chiffre d’affaires en 2016 était de 148 400 euros dont 119 600 euros à l’export pour une perte de 174 300 euros. Les chiffres pour l’année 2017 ne sont pas disponibles.
La start-up toulousaine a développé Aqualink, une gamme de purificateurs d’eau utilisant une technologie ancienne d’osmose inverse alimentée par photovoltaïque ou PVRO, conçue ici spécifiquement pour les pays en voie de développement.
En juin 2015, Sunwaterlife avait mené une campagne d’Equity Crowdfunding sur Wiseed. Elle avait collecté 350 000 euros auprès de 623 contributeurs. Guillaume, un wiseeder, y avait écrit le 9 janvier 2015 en commentaire :
Un système “PVRO” est un système complexe dans son dimensionnement notamment à petite échelle et sans apport constant d’énergie et un système extrêmement sensible aux lieux et conditions d’utilisations (eau saumâtre ou salée, ensoleillement, régularité d’utilisation… etc) . Il y a plusieurs acteurs sur ce secteur. C’est un marché difficile.
En 2016, Sunwaterlife a mené une campagne de financement participatif sur la plateforme Ulule en faveur des sinistrés de l’ouragan Matthew en Haïti. L’objectif était de permettre l’envoi de ses systèmes de purification d’eau. Elle n’a collecté que 1 257 euros ou environ 25% de son objectif financier minimum de 5 000 euros auprès de seulement 34 contributeurs.
En 2018, elle décide de faire évoluer son modèle économique à travers l’ouverture d’une filiale afin de concentrer ses efforts cette fois sur la production et la vente d’eau filtrée au litre, à partir de ses appareils. Ils sont sans doute jugés trop difficiles à commercialiser directement. Elle les achètera à sa maison mère, sécurisant ainsi le débouché commercial important qui manquait tant à Sunwaterlife.
La filiale O’Claire est créée pour l’occasion et a lancé une pre-ICO toujours valide, entre le 16 mars et le 30 avril 2018 afin de financer la distribution de 500 millions de litres d’eau potable à plus d’1 million d’habitants sur 3 continents sous la marque O’Claire. Pendant toute cette période, vous pouvez acquérir des WaterCoin ou WTR au prix unitaire de 0,01 euro exclusivement sur un site dédié. Cela correspond à une remise de 50% par rapport au futur prix de la crypto-monnaie pendant l‘ICO.
Au doigt mouillé, cette ICO dégouline de 3 bonnes intentions.
Bonne Intention #1 : Au côté des deux créateurs de Sunwaterlife, on retrouve Thierry Merquiol, le cofondateur de la plateforme de Financement Participatif Wiseed, à la tête d’un comité stratégique, ce qui crédibilise très sérieusement l’opération proposée. Il possède 5% du capital de O’Claire, société par actions simplifiée créée le 6 décembre 2017.
Bonne Intention #2 : O’Claire Donation est le fonds de dotation de la société O’Claire. Il a pour vocation d’intervenir dans des pays ou des zones très défavorisées ainsi que d’apporter sa contribution lors de catastrophes naturelles ou humaines. La société O’Claire SAS s’engage à alimenter le fonds de dotation à hauteur de 10% de son résultat courant avant impôt. Il sera doté de 20.000.000 WTR dès le premier jour.
Bonne Intention #3 : L’objectif de O’Claire est de mettre à la disposition de populations n’ayant pas accès à l’eau potable, des dispositifs de purification d’eau polluée appelés kiosks afin de la rendre suffisamment propre à la consommation humaine. Pour étancher leur soif, les personnes concernées pourront payer notamment avec des WTR ou avec des espèces pour acquérir les litres d’eau filtrée vendus en bonbonnes de 10 litres consignées.
Malgré toutes ces bonnes intentions affichées, cette ICO ressemble quand même à un pivot non avoué et un peu tarabiscoté pour essayer de sauver du naufrage Sunwaterlife.
Comme pour chaque ICO, vous pouvez lire le white paper ou Livre Blanc afin d’essayer d’y voir plus O’ Claire. Il ne fait, je serais tenté de l’écrire, que 47 pages. L’objectif financier est de collecter au moins 20 millions d’euros, not so bad pour une entreprise de moins de 6 mois et au capital de seulement 5 000 euros.
En cas de succès, cela représenterait 4 000 fois la mise de départ pour les actionnaires d’origine, sans lâcher un pour cent de capital. Voilà une ICO qui permettrait d’étancher les plus grandes soifs en toute indépendance !
Pourtant, personnellement, je suis resté quand même un peu sur ma soif après avoir parcouru le Livre Blanc.
L’eau purifiée est facturée 0,15 euro le litre mais il n’y a aucune information sur le prix de revient du litre d’eau de type comptabilité analytique.
Il manque surtout une analyse de la concurrence. Samuel, un autre wiseeder, avait déjà publié ce commentaire lors de la campagne d’Equity Crowdfunding de Sunwaterlife sur Wiseed, le 6 juin 2015 :
Bonjour,
vous oubliez un autre concurrent: les forages manuels et pompes a eau potable de fabrication locale (pompe à corde, par exemple), qui ne coutent que quelques milliers d’euros (forage + pompe), dont l’entretien est beaucoup moins cher, et qui fournissent beaucoup plus d’eau potable (meme sans soleil). Partout où il y a une nappe phreatique a moins de 40m, ce systeme parait nettement superieur (sauf en cas d’urgence type camp de refugies).
Evidemment, il reste de nombreux endroits où seules les eaux de surface sont disponibles, mais dans ce cas, quelle est la superiorite de votre systeme par rapport a un simple filtrage au sable/charbon suivi d’une pastille de chlore?
Son interrogation est plus que jamais pertinente au regard des nouveaux enjeux aujourd’hui plus importants avec l’ICO. Enfin cette dernière ferait plus sens et serait plus légitime ÀMHA, si la seule monnaie autorisée pour acheter le litre d’eau traité était la WTR.
Merci Michel pour cette nouvelle analyse comme toujours très négative. De mon côté je préfère “faire que défaire”… Et quand je vois la joie et l’enthousiasme des enfants kenyans qui pour la première fois de leur vie boivent de l’eau claire de O’CLAIRE (https://www.facebook.com/Watercoin-WTR-2144726212408130/ ), je trouve que le crible (ou le tamis) de votre intelligence devrait être plus fin, a minima plus objectif (figurez-vous que l’eau issue des forages est rarement potable…).
Mais trêve de bon sens, si nos intentions dégoulinent, j’aimerai plutôt qu’elles inondent, qu’elles étanchent les soifs et qu’elles rendent radieux encore plus d’enfants sur cette terre. Cette récompense-là vaut bien un watercoin non?
Bonsoir Thierry,
Merci pour avoir pris le temps de lire mon analyse malgré votre remarque les concernant que vous qualifiez de “toujours négatives”. Une lecture plus régulière du Blog vous aurait sans doute évité ce qualificatif inexact. Sur 30 start-up analysées entre décembre et janvier, 5 de ces start-up ont eu une analyse extrêmement positive. Vous répondez sur la qualité de l’eau issue des forages et je vous remercie d’exprimer votre opinion. Pour ma part je ne faisais que reprendre le commentaire interrogatif d’un wiseeder sans essayer de vouloir y répondre moi-même. Dommage que vous n’ayez pas répondu aux autres interrogations formulées dans le texte en préférant utiliser une vieille technique consistant à essayer de déconsidérer un auteur si ses textes ne vous brossent pas tout le temps dans le sens du poil. Reconnaissez que je pense toujours que vous apportez une caution morale importante à ce projet au regard de votre succès avec Wiseed. D’ailleurs je plaide pour que les ICO soient mieux encadrées juridiquement et qu’elles soient gérées par les plateformes existantes comme Wiseed dans le futur.
Bonjour, ce genre de projet est à fuir comme la peste. J’ai lu le white paper, la répartition de l’argent levé est ridicule, se servir de cette cause pour se faire de l’argent c’est éthiquement terrible. Honte aux fondateurs.
J’espère sincèrement que personne ne se fera avoir.