Une galère (du grec médiéval γαλέα / galéa) est un type de navire à rames et voiles latines sur un, deux ou trois mâts à antennes, d’abord à usage commercial puis à fonction essentiellement militaire. Elle est mue par des galériens qui constituent la chiourme. Ce sont des rameurs volontaires, des esclaves ou des repris de justice. Leur force musculaire est employée à actionner les rames, lorsque le vent ne souffle pas dans la bonne direction et lors de manœuvres d’attaques ou de parades. (Extrait de la page Wikipedia du mot galère)
Un bounty hunter est une personne optimiste ou désespérée ou fanatisée (au choix), qui accepte de réaliser une série de tâches spécifiques définie de manière générique par la start-up initiatrice d’une ICO, dans le seul espoir de recevoir en échange, une récompense toute virtuelle, sous la forme de quelques échantillons des tokens émis à cette occasion.
Pas de droit du travail applicable, pas de bulletin de salaire, pas de 35 heures, bref même pas de protection sociale à minima. C’est du pur travail au black qui échappe encore au législateur ébloui par tant de nouveautés économiques, aux pouvoirs de guérison miraculeuse supposée, sur une économie française en demi-teinte.
Je vous présente le nouveau galérien des temps modernes que l’on appelle pudiquement en gardant l’expression anglaise bounty hunter, sans vraiment chercher à lui donner une qualification en français, qui nous obligerait peut-être à ouvrir les yeux sur sa réalité quotidienne, pas toujours des plus glamour, de Vladivostok à Paris…
They treat people like nothing
J’ai eu l’idée de lui consacrer ce nouveau post, en lisant récemment cet extrait d’un article du Financial Times Alphaville (accessible librement sans avoir besoin de s’enregistrer à partir du titre tapé directement dans Google) intitulé The Baroness, The ICO Fiasco, and enter Steve Wozniak.
One bounty-hunter, Maksim Koselev, a 29-year-old Russian warehouse worker, told us he had spent about 10 to 15 minutes per day, seven days a week, promoting EQUI online for the months during which the ICO was running, which included writing two promotional articles about the company in Russian. He’s worked as a bounty-hunter for more than 100 ICOs, he said, and apart from the exit scams — where those raising money disappear with the funds they have raised — this is the worst experience he’s ever had. He, and others, said bounty-hunters should have been paid 2 per cent of the $7m Equi raised, particularly given that EQUI is still planning to raise money from investors. He told us:
We’ve been thrown out of the window with this… This is not the way you talk, even to bounty-hunters. They treat people like nothing.
Say Hi
Afin de nous aider à toucher du doigt plus précisément l’exploitation de ces bounty hunters, revenons à Paris, en prenant un exemple concret et d’actualité à travers le bounty program de Snips dans le cadre de sa Tokens sale en cours (ne l’appelez plus jamais ICO mais Tokens sale…) :
Bounty #1 : Partager le lien token.snips.ai et le hashtag #snipsAir : 200 tokens ou l’équivalent de 5,20 euros
Bounty #2 : Écrire un article/post sur Medium ou Steem.it : 1 000 tokens ou l’équivalent de 26 euros
Bounty #3 : Produire une vidéo à la gloire du concept de Snips AIR : 1 000 tokens ou l’équivalent de 26 euros
Bounty #4 : Convaincre un développeur ou maker de rejoindre Snips : 600 tokens dont la moitié pour le hunter ou 16,60 euros à partager en 2
Bounty #5 : Développer une application pour le Snips App Store : 750 tokens ou 19,5 euros
Et combien, pour juste un Hi au groupe Telegram de Snips ? (sorry, just a small private joke)
Bon, c’est bien connu quand on aime on ne compte(rait) pas… Mais attention, ces carottes crypto-monétaires n’ont aucun caractère automatique et leurs poids sont limités à 100 000 AIR tokens d’une valeur unitaire de 0,026 euro ou en tout l’équivalent de 2 600 euros. Cela représente un millième des 100 millions de tokens distribués pour le premier mois, sur un total d’un milliard en 10 mois.
Autant dire que certains vont y faire de multiples tours de manège sans être capables d’attraper les pompons suspendus par Rand Hindi himself. Normal, c’est aussi la fête internationale des neuneus ! 🙂
Mais plus sérieusement, vous l’aurez compris grâce à mon illustration avec l’exemple du bounty program de Snips, nous voyons bien ensemble que ces hunters sont quelque part les néo-esclaves des ICO’s.
Ils représentent les tâcherons du XXIe siècle qui réalisent les activités ingrates et subalternes, principalement de marketing, afin d’essayer de (sur)plaire aux règles édictées par l’initiateur de l’ICO, avec ou sans visa de l’AMF, malheureusement je crains.
Leur force musculaire cérébrale individuelle est employée pour actionner une rame virtuelle, lorsque le vent du marché ne souffle pas suffisamment dans la bonne direction, c’est-à-dire celle vers les futurs gogos de l’achat de crypto durant l’ICO…
En résumé, les bounty hunters sont les volontaires du travail forcé.
De manière plus surprenante, ils sont parfois des développeurs qui accepteraient d’être rémunérés avec des clopinettes. C’est le cas de l’ICO de Snips.
Cherche pas à comprendre, Dieu m’a donné la Foi
nous chanterait l’informaticien volontaire…
Alors ton Dieu ce serait Rand ?
aurais-je bien envie de lui répondre…
Chut ! 🙂
Une ICO est ainsi organisée humainement comme une galère sur 3 niveaux où certains seraient condamnés à beaucoup ramer pour un salaire de pitance que ferait presque envier, le niveau de rémunération horaire tant décrié pourtant, de l’ouvrier indonésien d’une usine de sneakers sous-traitante de Nike.
Niveau #0 : Sur le pont supérieur, vous trouvez sans difficultés la Diva qui est à la barre pour nous jouer sans fausses notes, sa partition ou son white paper. C’est la source d’inspiration et de transpiration de ses bounty hunters gérés telle une abstraction virtuelle nécessaire à l’exécution de tâches indispensables pour assurer la promotion de l’ICO.
Gestion de ressources humaines à distance nourrie à l’utopie collective car autrement comment voudriez-vous, que la Diva ne soit pas hantée la nuit, par le fantôme cauchemardesque du facteur-rapeur Olivier Besancenot ? 🙂
Niveau #-1 : En descendant d’un étage, on retrouve les salariés de la start-up où chacun participe à l’exécution, depuis l’intérieur de son cubicle, des tâches qui n’auront pu être déléguées aux bounty hunters. À l’intérieur de ces habitats de travail spartiates, la visibilité est parcellaire et limitée, sur les plans ou les intentions véritables de la Diva.
Niveau #-2 : Tout au fond de la cale, on aperçoit donc ces bounty hunters dispersés aux quatre coins du monde, mais unis grâce à l’application Telegram sans avoir encore besoin semble-t-il d’organiser le premier syndicat mondial des bounty hunters d‘ICO’s.
Quant à moi, toujours insensible aux charmes cachés des 5 récompenses de Snips, je préfère rester sur mes souvenirs de Bounty tropicaux, qu’ils soient gourmands à la noix de coco chocolatée ou cinéphiles avec le film sous les cocotiers, joué notamment par l’inoubliable Marlon Brando !
En guise de fin, permettez d’exprimer la morale immorale de cette histoire : C’est toujours le capitaine du navire, seul maître à bord après dieu, à l’image étincelante d’une Diva, qui décide de la route et in fine du sort de son équipage dispersé à tous les vents…
Mais enfin, quel galère, cette vie de galérien sans frontières qui me ferait penser à un nouveau Moyen Âge !
Au fait, vous savez vous, si le futur visa délivré par l’AMF prévoit une charte des droits du galérien euh pardon, je voulais dire du bounty hunter de l’ICO ? Personnellement j’en douterais un peu, mais je vous pose à tout hasard quand même la question…
Je l’admets volontiers, leur travail de régulation est immense et tellement complexe !