l’ICO de Tristan Colombet sur DomRaider : Tu veux jouer (encore) avec moi ?

DomRaider est une société par actions simplifiée au capital de 23 456 euros créée par Tristan Colombet, le 12 juillet 2013 à Clermont-Ferrand. Le dernier exercice comptable rendu public sur societe.com est celui de 2015, affichant un chiffre d’affaires de 307 600 euros, bien modeste au regard des déclarations et des ambitions de son fondateur. Le résultat de 54 400 euros est dopé aux immobilisations incorporelles afin d’être plus présentable. Son président est indirectement Tristan Colombet, via sa holding personnelle, une SARL au nom de Inovaa.

Le premier savoir-faire de Tristan est de créer des machines à cash très efficaces en pariant avant tout, sur l’absence de toute législation pour protéger le consommateur.

Prenez, Prizeee, qui était sa première cash machine, créée en 2000. C’était un éditeur de jeux en ligne rapportant déjà, aux joueurs assidus au-delà du raisonnable, de la monnaie virtuelle, échangeable contre des “cadeaux”. Pour que l’affaire soit rentable et elle l’a été, il fallait que les produits offerts en totalité, aient bien moins de valeur que l’argent dépensé par les joueurs addicts, pour acquérir leurs jetons virtuels.

Prizee a été vendue au groupe Digital Virgo en 2012, année où le chiffre d’affaires était à son maximum, soit plus de 10,77 millions d’euros pour un bénéfice de plus de 1,84 million d’euros. Bien joué Tristan ! Super timing ! Vendue aussi avant que la loi sur la consommation du 17 mars 2014, dite loi Hamon, ne vienne insérer son grain de sable, dans cette jolie mécanique de création de cash et d’enrichissement unilatéral pour son unique ancien propriétaire.

On retrouve le même pattern ou mécanisme de cash machine avec l’ICO de DomRaider : vendre une nouvelle fois de la monnaie virtuelle, tout en profitant à nouveau d’un vide juridique abyssal faisant de la France un nouveau Far West.

Le business de base de DomRaider n’était peut être pas aussi mirifique que cela, après tout. La start-up auvergnate était spécialisée dans le drop catching. Un nom anglo-saxon abscons pour les non-initiés, qui cache une activité un peu borderline à mon humble avis. Elle consiste à identifier avant tout le monde, grâce à des robots aux algorithmes optimisés, les noms de domaine qui n’ont pas été renouvelés par leurs anciens propriétaires, soit par désintérêt ou soit, ce qui est plus problématique, par négligence ou par oubli, surtout si le nom est protégé auprès de l’INPI. Le but était bien sûr de les revendre aux plus offrants.

Sur un marché d’environ 2 milliards d’euros selon le livre blanc de Domraider, la start-up en pèserait en 2015, moins d’un millième ! Beaucoup d’efforts donc pour de bien maigres résultats, mais Tristan ne manque pas de ressources.

Notre serial entrepreneur a eu une riche, très riche idée. Pourquoi ne pas concevoir une plateforme décentralisée d’enchères sécurisées, en temps réel et basée sur l’open source ? Du sur-mesure pour la technologie Blockchain et pour pouvoir ainsi justifier le lancement d’une ICO avant que le législateur ne se réveille…

Cette nouvelle plateforme qui n’existe même pas à l’état de prototype, balaierait implicitement d’un seul coup plusieurs siècles d’enchères : eBay, mais aussi Christie’s, l’Hotel Drouot et pendant que l’on y est, Sotheby’s et Bonhams… La monnaie virtuelle d’échange pour ces futures enchères sera composée des DomRaider Tokens ou DRT pour les intimes. Une fois les jetons acquis potentiellement par chacun d’entre nous lors de l’ICO, ils sont stockés dans notre portefeuille Ethereum mais et c’est bien précisé dans le fameux livre blanc, à nos seuls risques et périls.

DomRaider nous les propose à un prix d’ami, avant toute future spéculation potentielle, de 10 centimes d’euro le DRT. Attention, ils n’auront de la valeur que si le système d’enchères voit le jour et surtout, plus improbable encore, si il est effectivement utilisé par les détenteurs de cette nouvelle monnaie numérique réservée à la communauté. En attendant ces évènement très hypothétiques, cela va permettre à DomRaider de faire exploser son chiffre d’affaires, comme si elle avait été elle-même propriétaire de LasVegas.com et l’avait ensuite vendu !

Au dimanche 24 septembre 2017, 437 634 315 DRT auraient déjà été vendus au prix de 0,10 euro l’unité, soit plus de 100 fois le chiffre d’affaires de DomRaider pour l’ensemble de l’année 2015…

En fait, le terme ICO pour Initial Coin Offering est lui-même involontairement trompeur car il fait automatiquement penser à IPO et pourtant l’ICO en est très éloignée. En participant à l’Initial Public Offering d’une société, vous en devenez actionnaire. Avec l’ICO de DomRaider, vous ne pouvez revendiquer aucun droit de propriété de la start-up, vous n’êtes pas actionnaire mais simple acheteur, sans même la protection du consommateur !

Si vous prenez le temps de lire comme je l’ai fait, le livre blanc de 127 pages publié par DomRaider mais en commençant par la fin, ancien réflexe d’acheteur, vous découvrez des CGV blindées de blindées, qui exonèrent DomRaider de toute responsabilité, si jamais vos tokens se transformaient en lave séchée de volcans d’Auvergne éteints au lieu de l’or souhaité.

Autrement pour les geeks-spéculateurs-millionnaires virtuels et pressés de se délester de leurs chers bitcoins, la vente des DRT a lieu du 12 septembre au 11 octobre 2017. Les cartes de crédit classiques sont aussi acceptées…


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l’ICO de Tristan Colombet sur DomRaider : Tu veux jouer (encore) avec moi ?

3 réflexions au sujet de « l’ICO de Tristan Colombet sur DomRaider : Tu veux jouer (encore) avec moi ? »

  1. Bonjour,
    il y a plusieurs points que je n’ai pas compris.
    1: en quoi la loi hamon a changé la donne. Qu’est ce qu’il faisait, et qui a soudainement été bloquée ?
    2: il y a deja plusieurs marché pour la revente de domaine (ex: kifdom…). Quel interet y a t il à enchérir chez eux ce qu’on peut avoir directement chez un autre. D’ailleurs sur le site , je n’ai pas vu qu’il fallait convertir ses sous en OCI pour investir.
    Merci

    1. 1 – la loi Hamon a très encadré pour ne pas dire interdit les jeux primés.

      2 – Effectivement la concurrence est sévère sur la revente de noms de domaine et je ne vois pas l’intérêt non plus à enchérir à moins de vouloir absolument un nom en particulier. Oui curieusement le site de l’ICO est https://www.domraider.io/en et n’est pas annoncée clairement sur domraider.com…

      Je pense que tout cela est un moyen de rationaliser à posteriori l’ICO pour collecter au final un maximum d’argent.

  2. Quant on rachète un domaine expiré, on profite du maillage existant (les liens des autres sites). Plus un site a été partagé, plus il se retrouvera propulsé dans les résultats Google, voila pourquoi certains domaines se vendent très chers.

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