Mon post du 28 janvier était consacré à l’analyse post-mortem du projet initial de constitution d’un empire nommé Save, imaginé par le jeune et ambitieux Damien Morin. Sa start-up lui avait permis de réunir 15 millions d’euros de fonds propres ou de quasi fonds propres, auprès d’investisseurs reconnus et chevronnés. Grâce à ou malgré son âge, car Damien n’avait que 23 ans, à la date de création de sa société en 2013.
À l’origine de l’écriture de cet article, je voulais juste comprendre pourquoi cette start-up s’était retrouvée en redressement judiciaire, moins de 12 mois après sa levée de fonds. Elle avait eu le temps de cramer au moins 15 millions d’euros, soit une moyenne de plus d’un million par mois… c’est un bien triste record.
Malheureusement, tous ces professionnels confirmés de l’investissement dans les start-up ont cru avoir trouvé leur nouveau Mark Zuckerberg, mais ils avaient finalement recruté un super chief happiness officer, façon David Guetta à Ushuaïa.
À la suite de ma publication, Benoît Granger a tweeté :
Excellente démonstration de la règle : on peut créer une belle entreprise avec une idée de qualité B si l’équipe est de qualité A. Mais jamais avec une équipe de qualité B, même si l’idée est de qualité A.
Je suis bien d’accord avec Benoît sur l’application de cette règle. Je précise, qu’avoir un visage juvénile sympathique et que porter le hoodie de Mark Zuckerberg, ne sont effectivement pas des attributs suffisants pour faire partie d’une équipe de qualité A…
Paul Graham, entrepreneur et fondateur du célèbre incubateur YCombinator nous le confirme dans un de ses nombreux textes :
Could anyone be so naive as to think that resembling Zuck would be enough to make a founder succeed? And is it plausible that we, of all people, who’d interviewed thousands of founders, would think such a thing?
La panoplie du jeune Zuck, qui venait de créer Facebook en 2004, ne suffit évidemment pas pour dupliquer son succès exceptionnel. Pas plus que celle de Zorro, constituée d’un chapeau, d’une cape, d’un bandeau noir autour des yeux et d’une épée, ne suffirait à faire de celui qui l’a porte, un cavalier et un escrimeur d’exception. L’habit ne fait pas le moine.
4 chercheurs dont Pierre Azoulay du MIT’s Sloan School of Management, dans leur présentation du 17 juillet 2017 intitulée : Age and High-Growth Entrepreneurship, en rajoutent une couche statistique afin de répondre à leur propre interrogation :
When in life do people start firms and when do they start the most successful firms?
Ce tweet du 11 janvier 2018 de Ethan Mollick résume parfaitement et succinctement les conclusions de leurs travaux :
Common view of founders as 20-somethings is wrong. The average age of a founder is early 40’s (true for VC-backed firms, too!) according to work by @pierre_azoulay & co. Plus, the chance of a #startup being extremely successful goes up with founder age!
Eh oui, il y a des clichés qui ont la vie dure !
On dit couramment que le talent n’attend pas le nombre des années mais encore faut-il ne pas en être dépourvu, dès son plus jeune âge.
Je ne fais que citer, en l’adaptant quelque peu au monde moderne des start-up, Don Rodrigue, le personnage de Pierre Corneille dans Le Cid :
Je suis jeune, il est vrai ; mais aux âmes bien nées
La valeur n’attend point le nombre des années.