Qwant a développé une offre alternative au moteur de recherche Google, qui respecterait avant tout, la vie privée de ses utilisateurs.
Qwant serait d’abord une entreprise à but de souveraineté économique et numérique retrouvée, avant d’être une société à but lucratif.
Built to last…
Pour mettre les deux moteurs de recherche en perspective, Google Inc (Alphabet Inc depuis 2015) a été créée plus d’une décennie avant, le 7 septembre 1998 exactement, par Sergey Brin et Larry Page. Son premier apport en capital était constitué par un chèque de 100 000 dollars du cofondateur de Sun Microsystems, Andy Bechtolsheim.
Le 7 juin 1999, 2 VC’s prestigieux de la Silicon Valley, Kleiner Perkins et Sequoia Capital lui apportaient 25 millions de dollars.
En 2002, l’entreprise de Mountain View réalisait un chiffre d’affaires de 440 millions de dollars et un bénéfice de 100 millions de dollars…
Le 19 août 2004, Google Inc faisait son entrée au NASDAQ au prix de 85 dollars par action. L’introduction en Bourse permit de lever 1,7 milliard de dollars donnant à la compagnie, une valorisation initiale sur le marché, de 23,1 milliards de dollars.
Ces quelques chiffres concernant Google Inc, sont extraits de l’excellent livre publié en 2006, Google Story de David A. Vise (Prix Pulitzer) et de Mark Malseed, deux journalistes du Washington Post à l’époque.
Interlude façon Lactel
Le fils : Papa, c’est quoi cette souveraineté ?
Le père : C’est quand le souverain délivre arbitrairement à une start-up, un free pass* pour l’affranchir des contraintes du marché qui l’obligeraient un jour ou l’autre, à gagner plus d’argent qu’elle n’en consomme.
Le fils : Et cet affranchissement, ça peut durer combien de temps ?
Le père : Aussi longtemps que des médias influents ne tirent pas dessus à boulets rouges**.
Le fils : Si je comprends bien, si tu gagnes plus d’argent que tu n’en dépenses, alors seulement, tu peux être à la fois serein et souverain.
Le père : Exactly son!
La Commission d’enquête Souveraineté numérique du Sénat
Le 12 juin 2019 à 17h20, Éric Léandri, y a été auditionné en tant que président et fondateur de Qwant. Vous pouvez retrouver le script des questions/réponses ici.
Franck Montaugé, président : Monsieur Léandri, je vous invite à prêter serment, de dire toute la vérité, rien que la vérité, en levant la main droite et en disant “Je le jure”.
Éric Léandri : Je le jure.
…
Éric Léandri : Qwant est un moteur de recherche. Les moteurs de recherche relèvent du domaine de l’industrie, non de celui des start-up. On ne cherche pas de business model. On le connaît très bien. C’est Omid Kordestani, numéro 3 de Google, qui l’a inventé avec AdWords, grâce auquel Google touche de l’argent lorsqu’on clique sur une annonce. C’est le principe des moteurs de recherche. Il fonctionne très bien et rend un moteur de recherche rentable dès lors qu’il a suffisamment de requêtes quotidiennes. Ne vous y trompez pas : les bascules de l’administration, des banques, des grands groupes nous amènent à devenir très rentables, et c’est certainement le bon moment pour nous attaquer. (les mots en gras sont de mon fait)
Un peu plus tôt durant son audition, le dirigeant de Qwant expliquait la mise en douce musique de son Modèle Économique grâce à l’amplification de son partenariat commercial avec Microsoft.
Éric Léandri : Il n’y a pas la moindre donnée personnelle sur les serveurs de Microsoft. Bien évidemment, ce n’est pas le cas si vous cliquez sur les publicités de Microsoft, mais cela ne dépend pas de nous. … Tout est parfaitement cloisonné et étanche. Nous avons justement travaillé avec eux pour trouver un système qui le garantit. Si vous cliquez sur une publicité ou sur un résultat de recherche, nous ne contrôlons évidemment pas ce que les annonceurs ou les éditeurs de sites internet sur lesquels vous allez font de vos données mais, quand vous revenez sur Qwant, nous ne savons pas où vous êtes allé ni ce que vous avez recherché. Pour Qwant, vous demeurez anonyme. (les phrases en gras sont toujours de mon fait)
En visionnant sur YouTube ces échanges formels, courtois et détendus avec des sénateurs qui parfois ne manquaient pas d’humour, Éric Léandri m’a fait penser au professeur Faust, interprété par Michel Simon dans le film La Beauté du Diable
Au seuil de la mort, le professeur d’université Faust est plein de regrets. Méphistophélès lui propose alors un pacte : vendre son âme en échange de la jeunesse et de la richesse, il lui montrera aussi l’avenir.
Afin de pouvoir faire bénéficier son moteur de recherche d’une cure de longévité et de rentabilité, Éric Léandri n’avait donc pas hésité à céder l’exclusivité de l’exploitation de son Modèle Économique à Microsoft…
Nous ne savons quasiment rien des éléments financiers de cet accord sinon les généralités de ses principes, à travers la lecture du communiqué de presse commun des deux sociétés. Nous respecterons à notre tour leur vie privée, en n’exigeant pas de connaître par exemple, les termes exactes de la répartition du revenu publicitaire, entre David et Goliath. Rappelons-nous que Microsoft aurait d’après elle-même, 16,1% du marché du search en France et 23,2% en Allemagne…
La signature avec le sang numérique de Qwant représentait ÀMHA un sérieux coup de canif dans ses combats publics, afin de diaboliser uniquement les GAFA, qui étaient en fait des GAFAM. La lettre M de cet acronyme pour Google, Apple, Facebook, Amazon mais aussi Microsoft, était opportunément oubliée…
J’imagine prosaïquement que c’était le prix à payer pour espérer atteindre les rives de la profitabilité en 2021, après que Microsoft ait exaucé la plupart de ses autres vœux.
L’esprit malin était-il déjà dans la place depuis avril 2017 et l’arrivée d’un CMO ancien microsoftien ?
Ou ce Méphistophélès supposé était-il sorti tout droit d’une imagination débordante ?
* Le 14 avril 2015, Tweet d’Emmanuel Macron, ministre de l’économie Bravo au nouveau @Qwantcom ! Un Google français en marche https://www.qwant.com
En 2014, le groupe allemand Axel Springer (rachat en cours par le fonds américain KKR annoncé le 12 juin 2019) a investi 10 millions d’euros contre 20% du capital, afin de soulager sa colère de l’époque contre les pratiques de Google vis à vis de la Presse
En 2015, soutien financier de 25 millions d’euros de la part de la Banque Européenne d’Investissement sous la forme d’un prêt au départ d’une durée de 3 ans, convertible en actions
En 2017, premier apport [PDF] de la Caisse des Dépôts de 15 millions d’euros sous la forme d’une prise de participation de 20% du capital de Qwant. Axel Springer réinvestit 3,5 millions d’euros
En juin 2019, nouvel apport non officialisé de 7 millions d’euros de la Caisse des Dépôts…
** Le 1er juillet 2019, dossier payant de La Lettre A intitulé Qwant interpellé sur ses hauts salaires par la Caisse des dépôts
Le 2 juillet 2019, article principalement payant dans Le Figaro intitulé Qwant: enquête sur les déboires du «Google français»
Le 6 août 2019, dans NextINpact, 1er article en partie payant de Jean-Marc Manach intitulé Qwant : des résultats datés, limités (mais répétés)
Le 7 août 2019, dans Le Canard enchaîné, article intitulé Concurrencer Google ? Qwant ça veut pas… page 3
Le 8 août 2019, dans NextINpact, 2e article en partie payant de Jean-Marc Manach intitulé Le cahier de doléances des salariés de Qwant
Qwant a été créée le 9 juin 2011 par Éric Léandri, Jean-Manuel Rozan et Patrick Constant. C’est une SAS au capital de départ de 30 017,12 euros ayant son siège social à Paris dans le XVIe arrondissement. Le dernier bilan publié sur societe.com est celui de 2017. Il présente un chiffre d’affaires de 2 972 800 euros et un résultat net négatif de 8 583 200 euros.